Le Code civil, dans la rédaction de son article 2241, fait état qu’une demande en justice, même faite en référé, a pour effet d’interrompre le délai de prescription et de forclusion. Le deuxième alinéa précisant même, que ces dispositions s’appliquent lorsque la demande est portée devant une juridiction incompétente, ou lorsque l’acte de saisine est annulé par l’effet d’un vice de procédure.
C’est en se prévalant de cette exception d’incompétence qu’une entreprise ayant interjeté appel d’une décision prud’homale devant la Cour d’appel de Paris au lieu de la juridiction territorialement compétente, à savoir la juridiction Montpelliéraine, saisie cette dernière.
Comme le présume l’article 75 du Code de procédure civile imposant à la partie soulevant l’incompétence de faire connaître dans tous les cas le tribunal devant laquelle l’affaire est portée, l’entreprise interjette appel du même jugement, devant la Cour d’appel de Montpellier, en faisant valoir l’interruption du délai de forclusion d’appel.
La juridiction de second degré rejette pourtant la demande, jugeant l’appel irrecevable au motif que l’irrecevabilité formulée par la première Cour d’appel saisie, rend non-avenue l’interruption du délai d’appel.
Au second moyen de son pourvoi, la société demanderesse fait à nouveau valoir sur le fondement de l’article 2241 du Code civil, que sa saisine auprès de la juridiction d’appel incompétente, a automatiquement eu pour effet d’interrompre le délai de forclusion de l’appel, lui permettant ainsi d’interjeter appel devant la juridiction qualifiée.
La Cour de cassation n’accueille pas ce moyen, en faisant pour sa part application de l’article 2243 du Code civil, qui dispose que l’interruption d’appel est non-avenue lorsque la demande est définitivement rejetée.
Pour la deuxième chambre civile, la saisine de la Cour incompétente se solde par une décision d’irrecevabilité constitutif par conséquent d’une fin de non-recevoir. En conséquence de cette lecture, la haute juridiction considère que l’appel, lorsqu’il est rejeté par un moyen de fond ou par une fin de non-recevoir, rend non-avenue l’interruption du délai d’appel.
La solution de la Cour de cassation n’apporte pas une nouveauté, mais s’inscrit dans la logique procédurale. Pour la Cour, la sanction de l’appel formé devant la Cour d’appel incompétente est l’irrecevabilité et non l’exception de procédure, avec la précision en l’espèce et en matière de forclusion, que l’appel formé consécutivement au jugement du Conseil de Prud’hommes a lui reçu le bénéfice de l’effet interruptif puisque formé dans les délais, effet ayant disparu lors de la déclaration d’irrecevabilité.
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Référence de l’arrêt : Cass. civ 2ème 21 mars 2019 n° 17-10.663